Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Si tu es arrivé ici, nous pourrons peut-être échanger quelques idées...

Si tu n'es le "nazi" de personne...

Publié le 14 Novembre 2021

...c'est que tu manques de relief ! Ne dit-on pas "on est forcément le con de quelqu'un"  ? N'est pas vrai pour chacune et chacun d'entre nous, pour toi, pour moi ? Eh bien maintenant, nous sommes tous les "fascistes", les "nazis", la ou le "collabo" de quelqu'un ! Surtout si tu es médecin, soignant(e), pharmacien(ne), enseignant(e), fonctionnaire... et que tu admets la nécessité du passe sanitaire, ou plus simplement si tu ne considères pas les autorités de ton pays comme totalitaires et totalement corrompues, menteuses, manipulatrices, malfaisantes.

Mensonges et vérités foisonnent en fait partout et pas seulement du côté des autorités. L'information est truffée de faits, mais aussi d'opinions déguisées en faits, et parfois d'inventions pures et simples. Le tout, parfois habilement mélangé. Comment faire le tri ?

Il existe une méthodologie scientifique, juridique, policière et journalistique : la déontologie. Déontologiquement, toute information doit être vérifiable, vérifiée, recoupée. S'il y a des incertitudes ou des controverses, elles doivent être signalées. Si l'auteur exprime sa propre opinion, il doit aussi le signaler. En fin de compte c'est au lecteur de se former son opinion, mais preuves en main. Faute de respecter ces règles, on ne diffuse pas une "information" mais un "ouï-dire", une "rumeur".

Déonotologie vient du grec "deon" : honnêteté, devoir, rectitude, et "logos" : la connaissance, le discours.

Il existe aussi une méthodologie de la rumeur, de la désinformation et de la propagande : la synchysologie. La synchysologie s'apprend dans les écoles de marketing, mais aussi dans celles des services de propagande des dictatures et des puissances totalitaires (qui forment, pour saturer l'internet, des "web-brigades").

Sans passer par ces écoles ni appartenir à des "brigades", il existe des citoyens qui prennent tout simplement plaisir à redécouvrir et réinventer par eux-mêmes les principes de la synchysologie : influencer et troubler leurs contemporains en mélangeant vérités vérifiables et mensonges imaginés, en exagérant certains faits et en occultant d'autres, en sortant faits et affirmations de leur contexte, en modifiant textes et images et en changeant les légendes et commentaires, ou encore en attribuant des citations à des célébrités pour les crédibiliser.

Synchysologie vient du grec "synchys" : confusion, égarement, désordre, et "logos" : le savoir-faire, le faire-savoir.

Les sychisologues sont des créatifs dévoyés (ou corrompus, s'ils sont payés pour mentir). Imaginons un instant que toute cette masse de talents soit utilisée à des fins honnêtes, culturelles, artistiques, amusantes ou innovantes ! Nous pourrions construire des paradis. Mais les synchisologues ne s'encombrent ni de scrupules ni de déontologie, ne se fatiguent pas à chercher et produire des preuves irréfutables, ne vérifient et ne recroisent pas leurs sources et n'en retiennent que celles qui vont confirmer, ou avoir l'air de confirmer, les idées qu'ils avaient de toute manière avant l'évènement qu'ils commentent. Et nous construisons ainsi des enfers.

Pour le citoyen moyen, il est de plus en plus difficile de faire la part des choses s'il ne connaît pas la différence entre déontologie et synchysologie. Dans l'ignorance et la confusion, toutes les opinions se téléscopent et semblent se valoir (on appelle cela l'"ultracrépidarianisme", mot savant peu connu, mais désignant une réalité omniprésente). Ainsi, "2+2=666"  paraît aussi vraisemblable que "2+2=4"  et même, si la puissance publique, suspecte par nature de manipulation, dit que "2+2=4", alors "ce doit être faux".

Mais pourquoi la puissance publique serait-elle "suspecte par nature de manipulation" ? Outre que c'est, depuis toujours, le discours de toute opposition politique, force est de constater que les institutions ou les personnes-ressources institutionnelles qui normalement devraient garantir honnêteté de l'info et neutralité du spécialiste, manquent parfois à leurs devoirs, ce qui donne raison aux opposants :
* soit parce que ces institutionnels sont effectivement noyautés par les lobbies comme dans le fameux cas du nuage radioactif qui s'arrête aux frontières,
* soit par narcissisme (comme dans les cas de certains scientifiques ou ingénieurs pourvus d'égos surdimensionnés),
* soit par corruption (comme dans les scandales de l'amiante, du sang contaminé, du chlordécone, ou de certains produits pharmaceutiques).

Or, la confiance, comme la virginité, ça ne se perd qu'une fois. Un bon gros mensonge d'État, et c'est fini.

Mais cela ne signifie pas que ces manquements soient permanents et systématiques comme l'affirment les complotistes, qui n'en accusent, vous l'aurez remarqué, que les états démocratiques, et jamais les dictatures qui se renforcent et se multiplient depuis vingt ans. Pour illustrer ces courants d'opinion, les sociologues et politologues utilisent des schémas "en ballon de rugby" ou "en saucisses"  (vois le schéma joint).

Ainsi, si tu as des opinions modérées partagées par la majorité de nos concitoyens, tu te situes dans le "main stream"  ("courant principal" ou "majoritaire", en anglais : le milieu du schéma "en saucisses") autrement dit... tu te situes "dans le troupeau de gros bœufs imbéciles manipulés par les prédateurs et les puissants de ce monde, qui tiennent les rênes" et ne veulent pas les céder à d'autres, impatients de les remplacer.

Tu ne peux pas avoir des opinions modérées par toi-même, issues de tes propres recherches, doutes et réflexions. Tu es forcément sous influence, tu ne comprends pas le sens du monde et de la vie. Pour en sortir, une seule solution : trouver un gourou. Pas de souci : les réseaux sociaux grouillent de gourous. C'est curieux comme, avec la science, les techniques, les médias, la multiplicité des opinions et des doutes, on ne peut jamais développer une pensée libre, personnelle, honnête, indépendante. Cela n'est possible qu'avec un gourou. Lui, il te rend libre, te permet de t'accomplir. Quiconque ose en douter est un abruti, un aliéné, un pourri, un nazi. Tu ne peux que rompre avec lui, et tant pis s'il tenait à toi et que tu lui perces le coeur.

Quant à moi qui écris, je suis aussi le nazi de quelques-uns. Pas pour cause de "main stream".  Non : pour un trait d'humour. Dans un débat, un intervenant a parlé de "provocations sionistes" dans les banlieues françaises.

En souriant j'ai dit : « - on ne dit pas "provocations sionistes", on dit "les gars du Bétar" »  (le Bétar, c'est une organisation juive d'autodéfense). Ce n'était pas vraiment du second degré, car "provocations sionistes"  fleure l'antisémitisme quand même un peu. Mais un autre participant, ne voyant pas l'antisémitisme dans cette expression, a préféré le voir dans ma réplique, "limite nazie" selon lui.

Et voilà comment j'ai rejoint la majorité des médecins, soignant(e)s, pharmacien(ne)s, enseignant(e)s ou fonctionnaires dans le "melting pot"  où tout ce qui est contrariant est "nazi".

Continuez comme ça les gars, vous allez y arriver. À banaliser les crimes contre l'humanité, dont la Shoah, et à plonger dans la Nuit et le Brouillard tous les repères politiques, où tout est gris, où il n'y a plus de différence entre dictature et démocratie, entre science et rumeurs, entre faits et opinions, entre loi et chaos, entre violence et respect de la personne humaine, entre gauche et droite, entre espace laïc et espace religieux, entre solidarité et communautarisme, entre justice et vengeance... "Zorglub maître du monde" ? Ah non, c'est "Zemmour président".

Si tu n'es le "nazi" de personne...
Commenter cet article